Casse-noisette [Nerys]

« D'accord, d'accord, d'accord ! T'as gagné. On ne métamorphose personne en lapin parce que c'est évidemment une blague ! Comment tu voudrais faire ça, franchement ? »

Sauf que ça n'était pas une blague, bien entendu. Le problème, c'était que ça faisait quand même beaucoup de tracas pour pas grand-chose et dans le meilleur des cas, le résultat serait de toute façon incertain. Dans ces conditions, mieux valait laisser tomber l'idée et trouver une autre solution, encore que Jake n'en voyait pas, pour le moment. De toute façon, la discussion avait déjà dévié sur un tout autre sujet, celui du mariage de Callisto et le super-vilain s'attendait à tout moment à être déçu par Nerys. Ce qui ne manqua pas d'arriver.

La discussion dévia encore et encore au point de se demander s'il y avait réellement un fil à suivre tant tout cela semblait décousu et sans le moindre lien avec les sujets précédents. La question des chapeaux de doigt mise de côté, Jake évoqua celle de leur future rencontre qui permettrait alors de sceller leur Destin. Quel Destin, allez-vous me dire ? Et vous auriez raison de le demander mais le problème reste que seul le Destin pourrait vous répondre. Eh oui, je sais, c'est con, tout ça.

« Très bien ! »

Tous les écureuils avaient visiblement été sauvés et même si Jake avait probablement perdu son temps à préparer tout ça pour que ça ne débouche finalement sur rien, il n'en semblait pas plus troublé que ça. C'était la vie qui fonctionnait ainsi. Le super-vilain récupéra alors son sac et il commença à y fourrer tous les costumes.

« Eh ! » Jake se redressa, le regard suspicieux, et il scruta les arbres. « Je crois que quelqu'un n'a pas voulu rendre son chapeau ! Il m'en manque un. Où te caches-tu, petit voleur ? » Son regard passa de branche en branche, l'espace de quelques secondes et finalement, Jake haussa les épaules et referma son sac. « Bah, après tout, si ça lui fait plaisir. Il pourra frimer, comme ça. »

Après tout, ce n'était pas donné à tous les écureuils de porter un joli chapeau fait à la main ! Jake passa alors son sac sur ses épaules et glissa son téléphone dans sa poche avant de se retourner pour faire face à Nerys.

« J'imagine qu'il est l'heure de se dire au revoir, petite Alice. Je t'attends donc ici ou ailleurs, dans plus ou moins longtemps. Nous verrons bien. D'ici là, travaille ton rôle ! Je n'aimerais pas qu'on te coupe la tête parce que tu oublies une réplique ! » Il y avait quand même peu de risques mais bon, on ne savait jamais à quoi s'en tenir... « Quant à moi, je suppose que j'ai déjà raté l'heure du thé mais heureusement, il doit probablement être l'heure du thé quelque part dans le monde alors je ne suis pas vraiment en retard. »

Jake s'approcha alors de Nerys et sans vraiment lui laisser le temps de réagir, il l'attrapa pour l'enlacer, le plus amicalement du monde.

« Rentre bien au fond de tes bois ! Mais, fais quand même attention... Les arbres sont vicieux. » Ils étaient quand même responsables de la mort de ses parents adoptifs donc bon... S'agenouillant, Jake s'adressa enfin à Alwin. « Veille bien sur elle. » Plongeant sa main dans son sac, le super-vilain en tira l'un des chapeaux. « Tu veux un chapeau ? »

« J’ai eu un doute, désolée. Je comprends pas toujours le second degré. C’est… Bref. Puis franchement, on a des invasions d’autres mondes, des magiciens, des... Bref, et je sais pas quoi, métamorphoser quelqu’un en lapin, à côté, ça doit pas être si compliqué. »

C’est juste que ça ne se fait pas trop sans demander la permission. J’adorerai pouvoir me métamorphoser en l’un de mes animaux. Mais bon, je vais pas me plaindre, je peux déjà emprunter leurs corps, en soi, c’est presque la même chose. D’où le surnom, soit dit en passant, mais franchement, je crois qu’on se moque, là maintenant.

Puisque Jack a l’air de vouloir remballer ses affaires, je ramasse ce que je peux pour lui tendre ses affaires, jusqu’à ce qu’il se redresse soudain. J’esquisse un sourire. Quelque part, un écureuil avec un chapeau doit être franchement ravi. Le fait que l’homme veuille bien le lui laisser élargit mon sourire.

« Alors ça, c’est adorable de lui laisser. »

Ça fait gagner des points à Jack dans mon estime. Les petites choses de la vie, tout ça, vous voyez le genre ? Je regrette presque qu’il s’en aille déjà. Presque, parce que mes capacités de discussion ne sont pas extensibles à l’infini, puis qu’au départ, je n’étais pas censée m’attarder dans le parc. Puis parce qu’il est bizarre jusqu’au bout. Franchement, qui couperait la tête à quelqu’un pour une histoire de réplique ? C’est une drôle de blague, quand même. Enfin, ça doit être une blague, n’est-ce pas ? Songeuse, je ne réalise pas de suite qu’il est entré dans mon espace vital, alors je reste comme une crétine quand il m’enlace. Après une brève hésitation, je lui rends le geste, parce que je considère qu’il est assez sympa pour le mériter.

Il ne le saura jamais, mais franchement, il a de la chance. D’habitude, ce genre de trucs, c’est une sentence immédiate de coup de pied au cul. Je déteste qu’on me touche sans que je ne sois prévenue. Même un truc du genre, petit coup sur l’épaule, ça peut me hérisser le poil. Mais c’est juste que… Je sais pas, Jack a quelque chose qui me donne envie d’être plus tolérante avec lui, pour commencer, et il est tellement… Naturel ? Ouais, ça fait naturel.

« Il dit qu’il fait toujours ça. Veiller sur moi, je dis en retrouvant ma langue, un peu perplexe. Et qu’il veut bien un chapeau. »

Pourquoi, ça, j’en sais rien, mais en attendant, le border attrape délicatement la pièce de tissu entre ses dents et agite la queue.

« Je crois qu’il t’aime vraiment bien, j’ajoute en haussant les épaules. Salut, Jack ! Fais attention à toi en rentrant chez toi. »

Je sais que la ville n’est pas toujours sûre, et il a l’air tellement… Chou ? Trop pour résister à une agression. Je crois. Peut-être que je me trompe complètement et qu’il pourrait me mettre k.o. en cinq minutes, après tout ! Entre ce qu’on voit et ce que sont vraiment les gens, hein… Je le salue d’un petit geste de la main et repars sur ma route en trottinant, la tête bien occupée par toutes ses petites bizarreries mais un sourire satisfait aux lèvres. Des rencontres comme ça, j’aimerais en faire tous les jours, au fond. Vivement qu’on se recroise ! Peut-être que d’ici là, j’aurais vu Casse-Noisette.